Aujourd’hui, nous vous proposons de découvrir un extrait d’un ancien journal de développeur écrit par Graeme Davis concernant L’Ennemi Intérieur et les origines de Mort sur le Reik.
Lorsque la plupart des fans de WFJDR parlent de la campagne L’Ennemi Intérieur, c’est en général au sujet de Mort sur le Reik. C’est tout à fait compréhensible : cette aventure tentaculaire contient bien des choses qui sont devenues emblématiques de la campagne, et de WFJDR lui-même. Voyager sur une rivière, bien sûr, les attaques de mutants, les cultistes intrigants, la malepierre, les PNJ étranges, et bien sûr, une fin qui pousse les Personnages à se demander s’ils ont vraiment remporté la partie.
L’aventure a été élaborée autour du voyage fluvial afin de souligner le rôle des rivières de l’Empire dans le transport. Comme dans l’Europe médiévale, un fleuve est un moyen bien plus facile de déplacer des biens et des personnes que les routes. Les rivières sont déjà là et n’ont pas besoin d’être construites, elles restent ouvertes et praticables par tous les temps, sauf les plus extrêmes, et elles relient d’emblée les terres les plus fertiles, et donc les grandes villes, parce que le sol de leurs rives est bien arrosé et réapprovisionné en nutriments par les inondations occasionnelles…
D’une certaine manière, Mort sur le Reik était la première partie de la campagne originale, prévue comme telle. J’avais écrit Ombres sur Bögenhafen comme une aventure autonome, et Jim et Phil ont écrit L’Ennemi Intérieur autour de cette aventure. C’est ça L’Ennemi Intérieur, la première partie de la campagne, naturellement, plutôt que celle-ci dans son ensemble. Les deux ont d’abord été publiés comme deux produits distincts en utilisant l’ancien format en « modules », mais depuis qu’ils ont été liés sous le nom de La Campagne Impériale pour la réimpression de 1988, ils ont toujours partagé une seule reliure. L’Ennemi dans l’Ombre, la première partie du Director’s Cut, perpétue donc cette tradition.
Mais revenons à Mort sur le Reik, ou plutôt, à ses origines. Avant de travailler pour Games Workshop, Jim et Phil travaillaient chez TSR UK, la branche britannique de la société qui publiait à l’époque Donjons et Dragons. L’un de leurs derniers projets était un module de campagne intitulé Night’s Dark Terror (jamais paru en France). Il était assez révolutionnaire à cette époque car les modules autonomes étaient la norme et les campagnes de jeu de rôle n’en étaient qu’à leurs débuts. Presque aussitôt après leur arrivée, ils ont entrepris d’appliquer les mêmes principes de conception d’une campagne pour Warhammer Fantasy le jeu de rôle, et Mort sur le Reik ne constitue que les premiers fruits de ce processus. Ils ont cartographié une grande partie de l’Empire, de Delberz au nord, à Nuln au sud, avec des informations économiques sur les villes et un système commercial. Avec ma contribution au projet, le supplément La vie fluviale dans l’Empire, Mort sur le Reik contenait tout ce dont un MJ et ses joueurs avaient besoin pour sillonner les voies fluviales de l’Empire, et gagner de l’argent grâce au commerce et aux aventures.
De nombreux groupes s’y sont laissés prendre. Quand Le Pouvoir Derrière le Trône a été publié pour la première fois l’année suivante, nous avons reçu de nombreux retour de MJ qui peinaient à convaincre leurs joueurs d’abandonner la vie sur les voies fluviales pour se rendre à Middenheim vers la partie suivante de la campagne. Dans l’édition de Hogshead du Pouvoir Derrière le Trône, James Wallis ajouta donc une nouvelle section, Charogne sur le Reik, durant laquelle la barge des Personnages était détruite quoi qu’ils fassent, les obligeant à laisser la rivière derrière eux. Peut-être les règles de commerce maritime ont-elles eu trop de succès.
Mort sur le Reik ne représentait pas seulement un vaste territoire à parcourir au hasard. Plusieurs mini-aventures s’y déroulaient, certaines faisant suite à des événements antérieurs et d’autres conçues pour aider le MJ à gérer la première progression de Carrière des Personnages, car nous avions calculé qu’elle se produirait au cours de cette aventure. Le tout culminait dans un énorme château avec donjon infesté par le Chaos, qui occupait presque la moitié du livre.
Le développement de la version Director’s Cut de Mort sur le Reik a représenté un défi unique. À première vue, il ne manquait pas grand-chose : en termes de contenu d’aventure, ce volet de la campagne a toujours été le plus apprécié, alors pourquoi s’attaquer au succès ? En même temps, trente ans de retours et d’expérience ont permis d’identifier quelques sérieuses faiblesses.
Tout d’abord, comme L’Ennemi dans l’Ombre, cette aventure était très connue. J’ai dû entendre des gens ayant joué ou mené Mort sur le Reik m’en parler au moins à trois fois reprises. J’ai rajouté les encarts « Grognards » pour fournir aux MJ plusieurs nouvelles options, pour que l’aventure semble nouvelle à n’importe quels joueurs, même les plus expérimentés.
D’autre part, des joueurs ont rapporté au fil des années qu’ils trouvaient la somme d’informations trop difficile à appréhender, et ont mis en lumière quelques problèmes avec la partie centrale de l’aventure, durant laquelle les Personnages font la course avec un petit groupe de cultistes vers une cache de malepierre.
J’ai mis en pièce l’aventure et l’ai restructurée pour que tout soit plus facile à trouver et que le MJ conserve toutes les informations nécessaires à portée de main quand il en aurait besoin. J’ai considérablement étendu la chronologie, en offrant des conseils pour l’adapter aux événements, au fur et à mesure qu’ils se déroulent. J’espère que cela rendra l’aventure bien plus facile à gérer.
Enfin, les joueurs ont fait la remarque que la différence de puissance était trop importante entre Mort sur le Reik et Le Pouvoir Derrière le Trône, lors de la première publication. Deux aventures ont été alors publiées pour combler ce gouffre. The Grapes of Wrath de Carl Sargent a été publié dans White Dwarf et réimprimé dans l’anthologie The Restless Dead de Games Workshop. Comme je l’ai déjà mentionné plus tôt, James Wallis a ajouté Charogne sur le Reik à la réédition du Pouvoir Derrière le Trône de Hogshead. J’ai utilisé les meilleurs éléments des deux et, dans les Compagnons de Mort sur le Reik et du Pouvoir Derrière le Trône, je les ai intégrés dans une toute nouvelle sous-intrigue avec un nouvel antagoniste récurrent. Je pense que les lecteurs apprécieront. Tant que j’y étais, j’ai pris quelques mesures pour renforcer les liens entre les intrigues des deux aventures et rendre les pistes menant à Middenheim beaucoup plus claires.